mercredi 21 janvier 2009

Barrow leg 1 – Arrivée et installation à Barrow

Départ à 6 heures de Fairbanks, destination Barrow via Prudhoe bay. Première surprise, l'avion est plein. Que de monde pour une petite ville de moins de 5000 habitant ! Arrivée à Prudhoe Bay (dans le noir et le froid), l'avion se vide, nous laissant nous cinq plus trois personnes. Les autres passagers s'en vont rejoindre les champs de pétrole de l'Alaska et les installations techniques qui sont installées autour. Peu de personnes vont à Barrow, ce qui paraît normal pour une ville de moins de 5000 âmes. L'avion redécolle, l'aube commence à peine poindre (il est 10h00 du matin), mais nous laisse entrevoir une étendue uniforme, blanche et déserte. L'avion commence à entamer sa descente et nous apercevons la banquise, avec des zones d'eau libre d'où s'échappent quelques volutes blanches. A l'arrivée, nous sommes un peu saisi par le froid. Nous récupérons nos bagages dans le petit aéroport, y compris le sac de Bernard qui avait disparu depuis hier. Nok, vient nous récupérer à l'aéroport et dans une faible lumière, nous découvrons Barrow. Au sortir de l'aéroport, nous croisons quelques bâtiments relativement modernes en bardage, puis passé un lac, des bâtiments plus résidentiels. Nous empruntons alors une route longeant la plage qui nous conduit vers une ancienne base militaire reconvertie dans un assemblage hétéroclite d'entrepôts, d'ateliers, résidences en préfabriqué, citernes de fuel qui entourent le "collège".


C'est ici que se trouvent les locaux du Barrow Arctic Science Consortium (BASC) où nous allons travailler et le bâtiment de l'"Arctic Research Facility" où nous allons loger.

Nous sommes accueillis par Lewis Brower, un des responsables de BASC, qui nous explique rapidement l'organisation du BASC. Après un repas pris à la cafeteria du collège, nous découvrons le bâtiment où nous logeons, l'ARF. C'est un petit ensemble de bâtiments qui rassemble bureau, cuisine, logement, laboratoire, armurerie, atelier de réparation. Ce sont des locaux appartenant au Department of Wildlife Management du "North Slope Borough". C'est simple, pas très récent, mais bien pensé, et nous serons chez nous, au moins le soir. Dans la journée, Ambrose, un "local" occupe les lieux, vacant à ses occupations qui vont de la traditionnelle réparation de skidoo à la découpe de Caribou. L'été, les bâtiments sont occupés par des biologistes qui s'occupent de l'étude et la surveillance de l'écosystème.

L'après-midi et la soirée se passent à repérer les lieux et surtout nos caisses de matériel. Vers 15h30 il commence déjà à faire nuit. Les journées sont courtes à Barrow…



Bruno

mardi 20 janvier 2009

Barrow leg 1 - Une nouvelle série de trois campagnes...

Et nous repartons pour une campagne en Arctique, de l'autre coté de la mer de Beaufort, à la confluence avec la mer des Tchouktches. Cette fois-ci nous travaillerons à partir d'un village Inuit à la pointe nord de l'Alaska: Barrow. Cette campagne sera la première d'une série rapprochée de trois campagnes qui s'étaleront jusqu'au mois de Juin 2009. L'objectif sera l'étude de la "biogéochimie" de la glace de mer en Arctique, avec comme grande nouveauté la mesure des flux de CO2 entre la banquise et l'atmosphère. Nous laisserons pour cela en permanence un système de mesure sur la Banquise. J'y reviendrais…
Nous serons 5 personnes pour cette première campagne: Jean-Louis Tison (ULB), Nicolas-Xavier Geilfus (Ulg-ULB) et deux nouveaux venus, Bernard Heinesch et Michel Yernaux du Laboratoire de Physique des bio-systèmes de la Faculté Universitaire des Sciences Agronomiques de Gembloux, et moi. Pourquoi deux agronomes, dans un endroit et à une période où l'on ne voit même pas une touffe d'herbe ? Et bien, Bernard et Michel sont des spécialistes de la mesure micro-météorologique des flux de CO2, une mesure "high tech", très précise et qui s'effectue en continu. Ils se sont joint à nous pour déployer un système de mesure sur la Banquise, un système qui devrait fonctionner durant 5 mois. C'est un challenge, car nous allons non seulement devoir installer un mat avec des appareils délicats sur un milieu hostile (qui à surtout la faculté de pouvoir disparaître purement et simplement) dans des conditions météo qui ne le sont pas moins. En effet, la température oscille entre -25° et -30°C, sans compter le vent. Toutefois, le milieu à beau être hostile, il n'en est pas moins habité par des animaux et non des moindres, le plus gros prédateur terrestre en personne, l'ours blanc (certains souligneront que l'ours blanc est considéré comme un mammifère marin) et des renards polaire.
Voici une petite image qui donne un peu l'échelle de nos petits problèmes animaliers.



J'ai trouvé cette photo sur un site de fabriquant de d'instruments de mesures météorologique. Inutile de dire que nous espérons tous ne pas devoir faire la même photos avec nos instruments.

Nous sommes partis le Lundi 19 Janvier. Première surprise, la neige … à New York et 6 heures de retard pour notre avion. Evidemment, nous ne pouvons prendre aucune de nos correspondances et nous devrons passer une nuit dans la banlieue industrielle de New-York. Nous ne verrons Manhattan que depuis l'Aéroport. Dommage… Durant le vol suivant vers Seattle, nous avons été déroutés sur Portland, pour cause de mauvais temps également. Cela s'annonce bien !
Nous aurons survolé une Amérique du Nord entièrement gelée pour atterrir au cœur de l'Alaska, à Fairbanks, pour une dernière bière et une courte nuit avant Barrow. Il est en effet interdit de vendre et d'acheter de l'alcool à Barrow. Dur pour une équipe Belge!

Bruno

dimanche 30 mars 2008

CFL Leg 7 – Premières impressions…

Banks Island - N 71.03.852 W 121.47.205

Me revoici à bord du brise glace Amundsen pour poursuivre nos expériences sur la glace de mer dans l’Arctique canadien.

Il y a quelques jours je prenais le relais de Frédéric lors du traditionnel changement d’équipage qui se déroule toutes les 6 semaines. Pas d’hélicoptère cette fois-ci pour rejoindre le bateau mais bien de petits avions à hélice appelés Twin Otters qui ont la capacité de pouvoir atterrir sur la glace et freiner sur de très courtes distances. C’est sûr, ce genre d’atterrissage on s’en souvient toute sa vie. Difficile également d’imaginer que l’océan est quelques dizaines de centimètres en dessous de nous lorsque les roues de l’avion touchent la piste tracée par le chasse-neige et l’équipage du navire.


Vue de l’Amundsen depuis le Twin Otter juste avant l’atterrissage.




A peine descendu de l’avion, j’embarque sur une motoneige pour rallier le bateau ancré un peu plus loin dans la glace. J’aperçois du coin de l’œil une silhouette familière, c’est Fred qui s’apprête à quitter les lieux pour rentrer au pays. Une accolade, quelques instructions et le voilà déjà parti. Il a le visage creusé et des abîmes sous les yeux, je me doute que ces derniers jours n’ont pas dû être de tout repos pour lui… dire que dans six semaines j’aurai probablement la même allure.

Il est temps pour moi de retrouver ma chambre (par chance j’ai la même que la dernière fois), retrouver mes marques pour pouvoir me mettre rapidement au travail. Première constatation : le bateau est bien plus rempli que la dernière fois. L’espace va être cher. En fait, ces six semaines correspondent à la reprise de l’activité biologique des algues dans la glace après les précédents mois sombres et froids. En corrélation directe, une armée de glaciologues, biochimistes et biologistes déferle sur la mission. Cela constitue une opportunité unique de collaboration entre des chercheurs d’horizons différents, même si la coordination ne va pas être facile.


Pas facile de coordonner tant de personnes sur le terrain…



Fred a fait du bon boulot et je ne tarde pas à retrouver tout le matériel dont j’ai besoin (après quelques échanges emails je dois bien l’avouer… en plus d’être grand, le bateau est également rempli d’une myriade de caisses, sorte de labyrinthe géant dans lequel il est parfois difficile de ne pas se perdre). Le soir même de mon arrivée, les calibrations des différentes machines que je devrai utiliser sont déjà faites. Il est minuit et après quelques brefs instants sur le pont il est temps pour moi de rejoindre mon lit. Demain on commence à échantillonner et il s’agira alors d’être « focus » comme dirait Jean-Louis…

Si le rythme effréné des expériences me le permet, je reviendrai avec d’autres posts et d’autres photos dans les semaines qui viennent. Quoi qu’il en soit, j’aurai l’aide d’une autre plume le 3 avril puisque Bruno me rejoindra sur le bateau. En attendant, je vous laisse avec l’image toujours aussi féerique d’un coucher de soleil accompagné de sun dogs (phénomène lumineux provoqué par le passage de la lumière à travers de fin cristaux de glace en suspension dans l’atmosphère).



Sun Dogs près de Banks Island


Gauthier

lundi 25 février 2008

BGH - Petit lexique d’échantillonnage

25 février 2008 -41°10’S - 9°55E


Nous utilisons différentes méthodes de prélèvement afin d’avoir accès aux échantillons dont nous avons besoin. La plupart d’entre eux sont déployés à une vitesse de 1 m/s, ainsi pour faire un aller-retour surface – fond (qui ici peut aller jusqu’à 5000m) il faut au moins 3-4h. En voici un petit lexique illustré :

- Rosette CTD-Niskin : c’est la méthode classique de prélèvement en océanographie. 22 à 24 bouteilles de 12 litres (les Niskin, sorte de gros tubes en plastique consolidé gris) sont fixées sur un cadre métallique circulaire (la rosette) sur lequel sont également fixées des sondes, notamment la sonde CTD (conductivité, température, densité). La rosette est reliée à un câble de plus de 5000m de long qui permet de faire des prélèvements sur toute la colonne d’eau. Les sondes permettent d’avoir accès aux paramètres en temps réel au fur et à mesure de la descente ou de la remontée (en plus de la CTD, il y des mesures d’oxygène, de profondeur, de fluorimétrie, etc.) et de commander à quelle profondeur sera effectuée le prélèvement pour chacune des bouteilles. Nous utilisons cette rosette pour le CO2 (Bruno, Nix), le thorium (Fred, Frank), le baryum et la composition isotopique de silicium (François, Damien) et les incubations de phytoplancton (François, Damien).

- Les Go-Flo : il s’agit de bouteilles assez similaires aux Niskin. Les Go-Flo sont cependant attachées à un câble les unes sous les autres individuellement et non solidairement autour d’un cadre comme sur la rosette. Le câble qui est utilisé ici pour les Go-Flo est très particulier : il est protégé d’un plastique spécial afin d’éviter tout contact (et contamination) métallique avec l’eau qui est prélevée. Ce type de prélèvement est donc « ultra-propre » et est à la base des études de nombreux biogéochimistes à bord qui travaillent sur les métaux dans l’Océan austral. Il n’est pas utilisé par notre équipe









- Pompes in-situ (PIS). Les Niskins n’ayant une capacité que de 12 litres chacune, ce qui est parfois largement insuffisante pour pouvoir mesurer la composition chimique des particules. Dans l’océan, les particules sont principalement d’origine biologique (phyto et zoo-plancton, bactéries, pelotes fecales…) et d’un peu de matière d’origine non biologique (poussières, aérosols, re-suspension de sédiment, apports continentaux). L’activité biologique se concentre en surface, environ sur les 100 premiers mètres, là où il y a de la lumière et où les algues, à la base du réseau trophique, peuvent réaliser leur photosynthèse. En dessous de cette zone, la teneur en matière particulaire décroît de façon exponentielle, et, inversement, les besoins en volume d’eau des scientifiques étudiant ces phases augmentent considérablement. Les PIS qui csont des pompes dont chacune est alimentée par une batterie autonome, permettent de pomper et filtrer in situ de plusieurs centaines à plus de 1000 L. Pour cela elles doivent pomper pendant 2h heures avant d’être remontées. Sur un câble entre 5 et 12 pompes peuvent être déployées simultanément à différentes profondeurs. Ce système est à la base du travail de Anju pour les biomarqueurs organiques mais est aussi utilisé par Damien et François pour les isotopes du silicium.



- l’Octopus. Il s’agit ici d’un carottier qui permet de prélever simultanément 8 petites carottes sédimentaires (de moins d’un mètre de longueur) afin d’étudier les processus biogéochimiques à l’interface eau-sédiment. Grâce à une collaboration avec l’équipe en charge de cet instrument (Eric Viollier, Institut de Physique du Globe de Paris) nous pourrons presque tous accéder à ces précieux échantillons.













Damien


mercredi 20 février 2008

BGH - 20 février 2008 36°31’S 13°07’E : Super !

Nous voici enfin à notre première « Super » station. Si les vents nous sont cléments, il y en aura six au total. Elles seront réparties entre les différentes zones très contrastées en climat (température), caractéristiques physico-chimiques des eaux (salinité, courant, teneur en CO2, teneurs en nutriment azotés, phosphatés, silicatés et métaux en traces tels que fer…) et bien sûr biologiques (espèces dominantes, efflorescence…), que nous rencontrerons sur tout le transect de la campagne. L’Océan austral est ainsi subdivisé du nord au sud en différentes provinces biogéochimiques et nous sommes toujours à sa frontière nord, dans la zone subtropicale. Sur une « Super » station tout le monde travaille quasiment simultanément, car un maximum de paramètres et prélèvements sont en effet prévus : de l’atmosphère aux sédiments. C’est pourquoi nous resterons en station pendant au moins 48h afin de réaliser les 18 déploiements d’instruments nécessaires à satisfaire les besoins d’échantillons des 67 scientifiques à bord. L’équipe belge participe, quant à elle, à la moitié de ces échantillonnages. Arrivés hier vers 15h en station, le navire s’est transformé en véritable ruche. Bruno et Nix, habitués à être parmi les rares à travailler toute la nuit depuis le départ, en ont été tout surpris. En effet, cette nuit, les ponts débordaient d’activité. Aux petites heures du matin, le container VUB était plein. Anju et Frank montaient leurs filtres pour les pompes in-situ, François et Damien préparaient leurs diatomées, qu’ils venaient de prélever, pour les incuber pendant 24 et 48h et Fred se lançait lui aussi dans de nouvelles expériences « bio ». On essayera de vous expliquer par la suite chacune de ses manips. En attendant, place aux photos et à l’action !
Anju, Frank et François dans le container
(notez la customisation à l'arrière: affiches et fleurs artificielles)
François en plein effort de filtration

Fred à la recherche du thorium "bio"

Anju en cheffe de pont pour ses pompes

Damien

samedi 16 février 2008

BGH - Samedi 16 février, en mer...

34°S 15°E : pas vraiment une latitude polaire, mais on y arrive tout doucement. Après un faux départ et plusieurs jours de délais dus à des problèmes logistiques d’arrivée du matériel français, nous voici en route pour le Grand Sud. Atteindre d’abord le méridien de Greenwich, puis « tout droit » jusqu’à ce que le planning serré du Marion Dufresne nous oblige à arrêter les prélèvements et revenir en Afrique du Sud, les caisses pleines d’eaux australes, de particules mystérieuses et de données brutes acquises à bord mais pas encore vraiment digérées.
Avant le départ nous avons pu rendre hommage aux vents déchirant le Cap de Bonne Espérance, site éponyme de notre campagne BONUS-Goodhope, et observer la seule espèce de manchots qu’on trouve en Afrique, symbole du lien unissant les continents africain et antarctique. Depuis notre embarquement, les vents se sont calmés et le soleil brille au-dessus de ces eaux subtropicales, bleues et paisibles : profitons-en, cela ne pourra pas durer éternellement. Le conteneur-labo de la VUB, « customisé » à l’extérieur par les étudiants en art de la VUB et « customisé » à l’intérieur par François et Anju, est de l’avis de tous, le plus beau à bord. Il n’attend plus que les échantillons (carbone-silicium-thorium) pour tourner à plein régime, en attendant Fred passe ses standards et Frank vient s’y détendre régulièrement. Pour le baryum, les unités de filtrations sont prêtes. Bruno et Nix quant à eux ont commencé depuis plusieurs jours leur cadence infernale d’analyses pCO2 24h/j. Dans la nuit de samedi à dimanche, probablement au petit matin, démarrera notre première grosse station qui nous permettra de vérifier que les préparatifs de ces deux dernières années n’ont pas été vains.


Nix, Johan, Damien, Rodolphe, Anju et Frédéric au Cap de Bonne-Espérance (Goodhope)



Des manchots du cap


Le container de la Vrije Universiteit Brussel. Impossible de le manquer, une véritable oeuvre d'art, mais d'autres artistes oeuvrent à l'intérieur


Le Marion-Dufresne à quai à Capetown


Le Marion-Dufresne quitte le quai pour le grand sud


Damien

lundi 4 février 2008

BGH - Bonus-Goodhope - Une nouvelle campagne à la mer dans le grand sud.

(Désolé pour le retard dans la mise à jour du blog. Marc)
reçu le 16/02/2008

Et voilà, c’est reparti. Alors que Frédéric à pris le relais de Gauthier dans le grand nord canadien sur la campagne CFL, Nicolas-Xavier (alias Nix) et moi, nous allons rejoindre des vieilles connaissances, mais nouveaux venus sur le blog. Il s’agit de Frank Dehairs, professeur à la Vrije Universiteit Brussel, Anne-Julie Cavagna qui est étudiante en doctorat dans le cadre du projet Eur-ocean sous la responsabilité de Frank, deux chercheurs et un doctorant du Musée Royal d’Afrique Centrale (peu de rapport avec l’antarctique me direz vous, mais une des première qualité d’un chercheur c’est sans doute l’ouverture d’esprit) Damien Cardinal, Frédéric Planchon et François Fripiat. C’est donc une équipe de 7 Belges, qui collaborent ensemble sur le projet Belcanto (BELgian research on Carbon uptake in the ANTarctic Ocean: BELCANTO), qui vont rejoindre le Marion Dufresne, un des navires de recherche de l’Institut Paul-Emile Victor (Institut polaire Français). Avec plus de 120 m de long, c’est sans doute le plus grand navire de recherche océanographique européen. Pendant, 6 semaines nous allons échantillonner l’océan Atlantique, depuis la pointe sud de l’Afrique du Sud, jusqu’à l’Océan Antarctique (Océan Austral pour les puristes)…
Bruno